Le réalisateur de documentaires Jawad Rhalib passe avec brio à la fiction avec Amal, un esprit libre, un film puissant et percutant dans lequel une professeure de français doit livrer bataille, via ses simples armes pédagogiques, à l’intolérance qui prend de l’ampleur au sein de sa classe. Au cinéma le 17 avril. Et on vous offre des places du 5 au 16 avril dans l’espace Concours !
Amal, un esprit libre : l’histoire
Amal enseigne les lettres en cinquième à Bruxelles (l’équivalent de la première en France). Amoureuse des mots, éprise de transmission et de dialogue, elle déploie beaucoup d’énergie pour que chacun dans sa classe puisse exprimer ses opinions, mais s’emploie aussi à désamorcer les conflits qui y naissent et grossissent.
Parce qu’ils présument qu’elle est homosexuelle, Monia, l’une de ses élèves, est un jour agressée physiquement, violemment harcelée et menacée en ligne par des élèves de confession musulmane qui considèrent que c’est une attitude impie. Pour illustrer le fait que l’on peut être un bon croyant tout en ayant une orientation sexuelle différente, Amal, qui est également musulmane, leur fait découvrir les textes d’Aboû Nouwâs, auteur du VIIIème siècle, qui est l’un des plus illustres poètes du monde arabe, et qui aimait les hommes autant que les femmes, voire davantage.
Rapidement, son initiative suscite l’indignation de nombreux parents qui jugent que l’enseignante trahit ses origines et joue la carte de la provocation. Dans cette quête, Amal doit lutter également contre l’influence de Nabil, son collègue professeur de religion et imam converti, qui montre un visage parfaitement lisse et neutre en public, mais prêche pendant ses cours des idées radicalisées ( l’enseignement religieux et moral est obligatoire en Belgique, mais pourrait devenir facultatif en septembre 2024).
Au fur et à mesure, les choses vont s’envenimer à la fois pour Monia et Amal, au point d’aboutir à un point de non-retour …
A partir de quel âge ?
Amal, un esprit libre est un film destiné à un public adulte et adolescent, qu’on pourra voir à partir de 13-14 ans. Et il est conseillé d’en débattre en famille après la séance.
L’avis de MAFAMILLEZEN
L’univers scolaire inspire le septième art en ce moment. En quelques semaines, on a vu ainsi vu débarquer au milieu du préau La salle des profs, Le Monde est à eux, Pas de vagues et Amal, un esprit libre. Réalisé par le cinéaste belgo-marocain Jawad Rhalib, ce dernier fait partie des long-métrages qui marquent et font cogiter.
D’abord, parce qu’Amal, son héroïne, femme passionnée et sentinelle convaincue que le fondamentalisme est une « tumeur » contre laquelle il faut lutter, est interprétée de manière absolument magistrale par Lubna Azabal comédienne que l’on a vue en France dans Simone, le voyage du siècle. Dépourvue de toute coquetterie d’actrice, elle fait plus que l’incarner. Par sa voix, son charisme et toutes les fibres de son être, elle est cette enseignante qui résiste et ne plie devant aucune menace ou intimidation, quitte à courir vers l’abime. La scène où elle affronte Nabil devant la photocopieuse est assez évocatrice de cette intensité. Déjà récompensée par quatre Magritte, l’équivalent des César, pour ses précédents rôles, Lubna Azabal pourrait bientôt faire la passe de cinq !
Et contrairement à ce que l’on peut reprocher à Pas de vagues, les sujets dramatiques qui sont au cœur de cet opus sont abordés très finement et sans clichés. A savoir ici la difficulté d’enseigner quand les convictions se polarisent et que les dangers de la radicalisation islamiste gangrènent de l’intérieur un établissement scolaire.Tout parait vrai et juste.
Par ailleurs, les personnages ont de l’étoffe (y compris ceux des adolescents qui ont tendance à être caricaturés dans beaucoup de films). On sent ainsi les déchirements et les colères qui agitent Jalila, qui croit avoir trouvé dans une pratique ultra-rigoriste de sa religion la réponse à toutes les discriminations qu’elle subit. Rachid, va quant à lui réaliser petit à petit qu’il subit un endoctrinement familial. Et Monia préfère assumer ce qu’elle est plutôt que de se mentir et mentir aux autres.
On perçoit également de l’impuissance et la peur plutôt que l’indifférence ou la lâcheté chez les membres de la communauté éducative dont fait partie Amal. Comme celles qui étreignent la principale du lycée, lorsqu’elle est confrontée à cette flambée de haine entre les murs de l’école qu’elle dirige.
Il est appréciable enfin que Amal, un esprit libre évite aussi tout amalgame entre islam et islamiste : dans l’escalade de la violence qu’il décrit, un certain nombre de protagonistes musulmans, comme Amal et le père de Monia, sont adeptes de la tolérance. Son propos résonne donc avec particulièrement d’acuité, trois ans et demi après l’assassinat de Samuel Paty…
Amal, un esprit libre
Réalisé par : Jawad Rhalib
Avec : Lubna Azabal, Fabrizio Rongione et Catherine Salée
Genre : Drame
Durée :1h51
Sortie au cinéma : le 17 avril 2024
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