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La plus précieuse des marchandises, un conte pour raconter l’indicible

Par Bénédicte Flye Sainte Marie - Mise à jour le

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Après s’être déjà essayé à beaucoup de genres cinématographiques, Michel Hazanavicus, réalisateur entre autres de The Artist, explore le territoire de l’animation avec La plus précieuse des marchandises, pour dépeindre la rencontre entre une petite fille sauvée des trains de la mort et la mère de substitution que la vie va lui offrir, prête à tout pour la chérir. Au cinéma le 20 novembre.

 La plus précieuse des marchandises : l’histoire

Au fin fond d’une glaciale campagne polonaise, pendant la Seconde Guerre mondiale, un bûcheron et une bûcheronne partagent un quotidien rude mais paisible. Un soir, la femme ramène au sein de leur foyer un nourrisson qu’un passager a jeté de l’un de ces sinistres et innombrables convois qui sillonnent le pays, et qui ont pour terminus les camps d’extermination.

Certain qu’elle appartient à ce peuple qu’il considère comme inférieur et qu’il l’appelle les « sans-cœur », son mari refuse de partager son toit avec cette enfant venue de nulle part et la rejette. Pour s’occuper d’elle, la paysanne est obligée de s’installer en catimini dans une misérable dépendance de leur ferme. Jour après jour, mois après mois, la petite fille grandit tout en joie et sourire, et même cet homme apparemment impitoyable finit par s’attacher à elle.

Mais le danger se tapit partout. Des oreilles et des yeux malfaisants ne cessent de rôder autour d’eux, et ce bonheur tout neuf qui irrigue leur famille est rapidement menacé. Pour se préserver de ceux qui les persécutent, la brave bûcheronne et sa protégée vont devoir fuir et se réinventer plusieurs fois une nouvelle existence ailleurs…

A partir de quel âge ?

9 ans, en ayant de préférence abordé la question de la Shoah auparavant avec les enfants qui iront voir le film.

L’avis de MAFAMILLEZEN

La plus précieuse des marchandises est aussi la plus belle. Car ce film l’est d’abord dans ce qu’il relate, à savoir le parcours d’une enfant sauvée de l’innommable par le geste fou de son père. Puis le télescopage, fruit du hasard ou du destin, avec cette femme en mal d’enfant, qui deviendra pour elle ce phare qui se dresse dans l’horreur. Cette seconde maman que rien n’arrêtera, même pas les émissaires des nazis, la pauvreté, le froid et la faim. Dans la galerie des êtres meurtris par la vie que le récit comporte, on peut également citer l’ancien soldat, aujourd’hui gueule cassée, qui va accepter de les prendre sous son aile. Comme l’intrigue, le graphisme de ce long-métrage, teinté de gris, de noir, de blanc et de lignes dures, est également assez remarquable de sobriété et d’expressivité, à l’instar de la bande-originale, déchirante et éloquente.

Un autre des atours majeurs de La plus précieuse des marchandises est de procéder par allusions. L’Holocauste, les Juifs et l’inhumanité de ce qu’ils subissent ne sont en effet jamais nommés. Plus explicites ici qu’à l’écrit dans le roman de Jean-Claude Grumberg, dont cet opus est tiré, les images viennent remplir ces points de suspension : l’aspect monstrueux des locomotives qui prennent des allures de bêtes sauvages fendant les paysages enneigés et immaculés. Les visages convulsés des déportés. La désincarnation des rescapés, réduits à n’être que l’ombre d’eux-mêmes au point qu’ils terrifient leurs proches. Ces images sont toutes aussi parlantes que des mots. Grâce à ce procédé, ce film reste regardable, y compris avec des enfants assez jeunes, sans pour autant perdre en force dans ce qu’il dénonce.

On ne peut enfin que saluer l’éclectisme et le goût du risque de Michel Hazanavicius. Le réalisateur aurait pu facilement capitaliser sur ce qui a fait son succès en salles, par exemple les pastiches des films d’espionnage, un registre qu’il a conjugué dans OSS 117 : Le Caire, nid d’espions et OSS 117 : Rio ne répond plus. Mais il préfère changer de répertoire à chacun de ses long-métrages. Difficile de trouver des points communs entre La plus précieuse des marchandises, et le très réussi Coupez !, qui a précédé cet opus, si ce n’est l’exigence qui préside à leur conception. Un travail d’autant plus remarquable que c’est Michel Hazavicius, véritable homme-orchestre du septième art français, qui a dessiné lui-même ses personnages !

La plus précieuse des marchandises
Réalisé par : Michel Hazanavicius
Avec les voix de :
Dominique Blanc, Grégory Gadebois et Jean-Louis Trintignant
Genre :
Animation, Drame
Durée :
1h21
Sortie au cinéma :
le 20 novembre 2024

A LIRE :

La Plus Précieuse des marchandises, un conte (2019), de Jean-Claude Grumberg, a reçu de nombreux prix. En 2024, il a été adapté au cinéma par Michel Hazanavicius, qui a lui-même dessiné les personnages de son film d’animation. Un choix de dessins originaux, extraits de ses carnets de travail, accompagne cette nouvelle édition de La Plus Précieuse des marchandises, chez Seuil. Commander sur la Fnac

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